26 février 2007

Autres études

L’histoire se profile, les personnages s’éclaircissent.
Les premiers noms arrivent.
Je passe de doutes très profonds à des moments de grand enthousiasme, mais pour autant que je me souvienne, c’est toujours comme ça.
Je me suis remis un peu à travailler sur un papier différent du Moulin du coq, et voici les résultats. Ce sont des études de caractère et vestiaire.












Le papier Moulin du coq a un défaut : on n’arrive pas à enlever les traits de crayon. Je ne sais pas pourquoi.
Mais malgré ça, la manière dont il réagit au pinceau est une bénédiction.
Alors je suis revenu à lui, la queue entre les jambes.
Voici le personnage précédent sur papier Moulin…











Et lui, c’est un pirate d’origine irlandaise.











Et un africain.



22 février 2007

La leçon de ce matin

Voici la leçon (une partie) que j’ai eue ce matin.

Je reprends la main peu à peu.
Ce qui est difficile, c’est de conserver un dessin de synthèse tout en se laissant un peu aller sur les formes baroques des vêtements, des parures, des rides des visages.
Et puis la lumière ne marche toujours pas, mais elle va marcher… Je l’espère (c’est ce que je me dis)… Plus tard.
Dans ce premier dessin de chaloupe (j’ai enfin “la chaloupe”, merci beaucoup), j’ai fait mille erreurs.
La plus grave était d’avoir perdu la lumière dans la partie arrière de la chaloupe.
En fait, dans la zone qui est dans l’ombre, il n’y a pas de lumière. Certains trouveront peut-être ça normal, mais pour moi c’est une erreur :)











Dans la seconde tentative, je me suis souvenu de l’importance de conserver une gamme de ton homogène.
J’ai fait un fond ocre très léger, qui a fait virer toutes les couleurs suivantes. Malheureusement, j’ai raté la lumière/ombre sur la chemise d’un des marins et ça m’a obligé (anathème !) à mettre des touches de feutre blanc sur l’aquarelle : une faute pour laquelle j’aurais coupé la main de mes élèves à l’école de BD.












Enfin, je me suis dit que j’aurais pu travailler “à l’ancienne”, en mettant dessous une première version du dessin uniquement monochrome (verdâtre, me suis-je dit) pour ensuite faire surgir les couleurs par voiles successives. Ça aussi, ce serait une chose interdite à faire avec l’aquarelle, mais le papier Moulin du coq que j’utilise tient le coup et le résultat est assez bon.

C’est peut-être la solution.











Pour finir, voici un jeu de caractérisation pour un personnage qui s’avèrera particulièrement déplaisant. Ce n’est que sa première version. Il sera bien pire, et gardera une peau jaune.











Excusez-moi de vous faire partager tout ça. Je suis fait comme ça. Si je suis chiant dites-le-moi.

20 février 2007

Tout est difficile



Tout est difficile dans la nouvelle histoire de pirates. Le cadre, les objets, les couleurs sont difficiles. Les objets, surtout, tous les objets que je dois dessiner sont inconnus. Je sais, par exemple, ce qu’on mangeait au XVIIIe, mais comment étaient préparés les plats ? Je veux dire, quel aspect ils avaient vraiment ? Et les assiettes, et les verres, les coupes, les carafes, les nappes ? Les chaises, les table, les ornements ?

C’est la première fois que je me retrouve à travailler sur un sujet dont je n’ai pas une connaissance personnelle et directe. C’est très difficile, mais j’imagine que les autres dessinateurs, habitués à faire des recherches et des études de décor, rigolent bien en lisant mes lamentations.
Mais moi, les études de décor, je ne les supporte pas.











Et puis il y a la question des actions, des mouvements, des voiles, des positions des marins et de la complexité des haubans et la forme des vagues dans l’océan et la couleur du ciel, du ciel serein, du ciel nuageux… OK. J’aurais dû faire plus d’études. Dernièrement je me suis un peu laissé aller. Je dois me remettre à faire du vrai dessin, à étudier les lumières, les couleurs.

Dessiner, étudier. Encore, et encore.


15 février 2007

Histoire de pirates

Nous sommes devant Beaubourg. Nous nous sommes donné rendez-vous là. Devant Beaubourg.
Il y a une grande exposition Hergé, que je n’irai pas voir, et il pleut. Une pluie fine, très fine, et glacée. Du moins, cette pluie me paraît-elle glacée, à moi. J’ai la fièvre.
Le fait est qu’à Angoulême, je me suis débauché. Un de mes amis, en m’écoutant raconter mes nuits du festival, a ri et fait ce commentaire : "Peur et délire à Angoulême".

Il exagérait. Mais il est vrai que j’ai bu, fumé et dansé comme un imbécile. Un homme d’âge moyen avec un chapeau d’imbécile qui danse comme un rapper drogué jusqu’à l’aube. Joli spectacle… Je suis content de ne pas m’être vu de l’extérieur.
Débauche et danse jusqu’à l’aube, ça suffit, pour un petit corps comme le mien, pour un esprit comme le mien, pour tomber malade.
Je suis devant Beaubourg, avec Patrick, mon nouvel ami. Nous attendons Massimo, mon ami.
Quand Massimo arrive, la première chose que je dis, c’est que je ne ferai pas d’histoires de pirates. Nous en avons parlé, les jours précédents, et là, il me semble très important de préciser que j’ai DÉFINITIVEMENT changé d’avis. Sorry Massimo. Zéro histoire de pirates. Massimo me dit “Dommage”.
Je réalise (juste un instant, et après je me remets à penser le contraire) que, peut-être, le monde ne dépend pas entièrement de mes décisions de raconter telle histoire ou telle autre.

Je dis la même chose à Igort. Je sais très bien que deux jours plus tôt je lui ai pris la tête avec cette idée d’ambiance de pirates et que j’avais l’air passionné. Tout ça, c’est fini, je lui dis. Si vous m’entendez encore parler d’histoires de pirates, filez-moi des claques.

Moi et les pirates, c’est terminé. Ça n’avait même pas commencé. De toute façon, c’est terminé. TER-MI-NÉ.


J’ai raté mon avion pour rentrer en Italie. La faute à la fièvre et aux jolies filles qui me distraient. Je me suis retrouvé dans le RER qui me conduisait à l’aéroport, la feuille d’horaire dans la main, à me rendre compte que ce que j’avais pris pour un huit était en réalité un six, et que l’avion était parti depuis deux heures.

J’ai pris un autre vol. Je l’ai choisi pour l’heure : le samedi, le vol Easyjet Paris-Orly - Pise se fait en plein jour. Ce qui veut dire, avec un peu de chance, les Alpes vues d’en haut, puis la côte et les Alpes Apuane, les bateaux et la mer. Tout cela vu du ciel.
Il y avait des nuages qui ressemblaient à des Pringles. Les chips Pringles, vous voyez ? Quand elles sont encore dans la boîte, en petites tranches minces, pressées les unes sur les autres. Ces nuages étaient disposés de la même façon, comme des Pringles dans leur boîte.

Au moment de l’atterrissage, en descendant au-dessus de la base militaire de Campo Darby (et en ne pensant qu’à une chose : réussir à apercevoir les bombes atomiques cachées dans la pinède) l’avion s’est trouvé face à tout un tas de ces Pringles, il les a contournées et a tourné le dos au soleil. Au milieu de ces deux tours de chips toute blanches en tranches filtrait la lumière du coucher du soleil, et moi, cette beauté me rendait fou. Ça ne m’était jamais arrivé avec les Pringles.

Derrière moi, deux adolescents parlaient de je ne sais quelle saloperie de chanteur de merde, ils avaient les yeux fixés sur le couloir et la lumière du soleil les dérangeait. J’espère que c’était la millionième fois qu’ils traversaient le ciel de cette façon et que maintenant, ils étaient blasés par cette merveille. Si ce n’est pas ça, je forme des vœux pour que leurs parents les suppriment avant qu’ils atteignent l’âge auquel on a le droit de voter

Et puis, à la maison, l’histoire est sortie toute seule. Les deux premières pages, du moins. Elles sont devenues “vraies” quand j’ai trouvé la voix. Et la voix était une prière, un Ave Maria d’un malheureux jeté à l’océan.
Et les dessins sont arrivés, le bon papier s’est révélé, les couleurs sont venues toute seules.
C’est toujours comme ça, maintenant que j’y pense, mais je l’oublie toujours.
C’est difficile d’écrire en étant dans une autre époque. C’est tellement différent des choses que j’ai faites jusqu’à présent. Mais cette prière m’a aidé et maintenant, j’en suis aux vingt premières pages du scénario et je suis content. Effrayé, content. Effrayé.

Nous y revoilà. C’est une histoire de pirates.





Pardon, Vierge Marie.
Pour tout le mal que j'ai fait. Pour tout celui que je n'ai pas empêché les autres de faire.
Pardon, Vierge Marie.